Par Andréanne Blais, coordonnatrice à la conservation des milieux naturels au CRE du Centre-du-Québec (CRECQ)
Déjà presque six ans que la Cour supérieure rendait son jugement en faveur de l’entreprise Atocas de l’Érable, affirmant que le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC, à l’époque MDDELCC) a agi illégalement en exigeant des compensations pour la destruction d’un milieu humide.
Cet événement avait amené le ministère à adopter une loi concernant des mesures de compensation pour la réalisation de projets affectant un milieu humide et hydrique (MHH). Cette loi autorisait le MELCC à exiger des mesures de compensation, mais ce pouvoir prendrait fin en mars 2018 si le gouvernement ne sanctionnait pas une loi portant sur la gestion durable des MHH.
C’est ainsi que l’Assemblée nationale adoptait en 2018 la Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques. Cette dernière est, selon ma perception, une loi moderne qui apporte des outils innovants en matière de planification de la conservation — notamment par l’instauration des plans régionaux des MHH, la reconnaissance de l’importance de la concertation avec les organismes de bassin versant (OBV), les conseils régionaux de l’environnement (CRE) et les tables de concertations régionales (TCR), du règlement sur les compensations et du programme sur la restauration et la création.
Comme dans bien des dossiers innovants, il est difficile d’offrir des modèles parfaits répondant en tout point aux exigences. Toutefois, ces outils se révéleront excellents si les acteurs concernés prennent la balle au bond et s’efforcent de travailler collectivement à leur réussite. Je ne crois pas que le MELCC a voulu fournir toutes les pièces du casse-tête dans une seule loi. Il a balisé les grandes orientations et a ouvert la porte à une autonomie régionale. Ceci donne aux acteurs du milieu une occasion de construire ensemble une planification du territoire à l’image des enjeux régionaux.
Voilà une belle mission pour tous, notamment pour les CRE dans le cadre de leur mission principale, la concertation.
Les CRE sont des intervenants incontournables pour rallier les parties prenantes autour d’une compréhension commune et favoriser une adhésion aux grandes orientations de la loi. Il s’agit en effet d’un grand défi où l’humain est au cœur de la planification, et un espace d’échange et de compréhension est nécessaire.
Il faut identifier les besoins de tous les acteurs régionaux et comprendre la dynamique dans laquelle ils s’insèrent. Ces informations permettront de déterminer les conflits d’usage en lien avec la conservation et d’entreprendre un arbitrage. Dans cette grande étape, les intervenants apporteront des solutions concrètes à la conservation des milieux naturels dans une optique de développement durable. C’est par la force d’un grand réseau comme celui des CRE et la collaboration avec les autres réseaux comme celui des OBV que les options innovantes émaneront et pourront être proposées aux instances municipales.
Ainsi, je considère que les CRE, en concertation avec les autres intervenants du territoire, ont ici une belle occasion de répondre à l’autonomie offerte par le MELCC dans la réalisation des orientations. Les CRE sont appelés à promouvoir et développer une expertise en aménagement du territoire tenant compte de la conservation des milieux naturels dans un cadre respectueux de tous.