Le 1er novembre 2016 – Le RNCREQ a déposé un mémoire à la Commission des transports et de l’environnement concernant la Loi modifiant la Loi sur la qualité de l’environnement afin de moderniser le régime d’autorisation environnementale et modifiant d’autres dispositions législatives notamment pour réformer la gouvernance du Fonds vert.
Contexte
Le RNCREQ avait déposé en septembre 2015 son mémoire sur les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 89 (Loi modifiant la Loi sur la qualité de l’environ-nement afin d’en renforcer le respect) à la Commission des transports et de l’environnement. Le RNCREQ, qui avait manifesté son appui au ministre David Heurtel, encourageait le gouvernement à continuer les travaux sans précipitation et à poursuivre le dialogue. Le réseau des CRE, très interpellé par cet exercice, s’était dit prêt à contribuer à la suite des choses en jouant son rôle : celui d’un partenaire qui connaît les réalités partout au Québec, qui intervient avec rigueur et qui s’exprime toujours sur le mode constructif. Le mémoire du RNCREQ sur le Livre vert est accessible en ligne (en cliquant ce lien)
Considérations et recommandations générales
Le Regroupement national des conseils régionaux de l’environnement (RNCREQ) est très heureux de voir le gouvernement du Québec poursuivre la modernisation du régime d’autorisation environnementale de la Loi sur la qualité de l’environnement (LQE). C’est tout à l’honneur du ministre du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, David Heurtel, d’avoir réussi à mener ce chantier à cette nouvelle étape, sachant que plusieurs autres avant lui ont échoué dans leurs tentatives. Cela dit, la partie est encore loin d’être gagnée.
Rappelons que la LQE a été adoptée il y a plus de 40 ans, en 1972, et n’a pas été modifiée de manière globale depuis et ce, malgré l’évolution des préoccupations de la société, du tissu économique et des enjeux environnementaux. Une situation qui non seulement nuit à la protection de l’environnement mais aussi au développement économique.
Comme le RNCREQ l’avait déjà souligné au printemps 2015 dans son mémoire sur le projet de Stratégie gouvernementale de développement durable 2015-2020, le MDDELCC doit pouvoir compter sur des outils adéquats et modernes pour assurer son rôle premier de protection de l’environnement. Le RNCREQ est donc très satisfait de voir que la modernisation de la LQE en est désormais à cette ultime étape.
Certes, la modernisation de la LQE ne pourra pas à elle seule corriger l’ensemble de lacunes constatées dans la réalisation du mandat de protection de l’environnement du gouvernement, puisque celle-ci est compromise non seulement par la vétusté de la LQE, mais aussi par le manque flagrant de ressources humaines et financières du MDDELCC – autre sujet sur lequel le RNCREQ insiste régulièrement. En dix ans, le budget du Ministère a chuté de 5 %, passant de 0,3 % à 0,2 % du budget
global de l’État, alors même qu’il s’est vu confier des responsabilités supplémentaires en matière de développement durable et de lutte contre les changements climatiques. Il est intéressant de constater que le budget total du MDDELCC est l’équivalent d’une journée et demie du budget du ministère de la Santé et des Services sociaux. Pourtant, on fait de plus en plus le lien entre l’environnement et la santé.
Récapitulatif des recommandations
Recommandation 1
Le RNCREQ demande au gouvernement de donner au ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques les ressources financières nécessaires à l’accomplissement de sa mission et de ses
responsabilités.
En analysant le Livre vert et les objectifs qu’on y décrivait pour motiver l’exercice de modernisation, le RNCREQ avait constaté un biais évident en faveur des demandeurs d’autorisation (« les clients »).
Avec cette réforme, le gouvernement cherche à mieux satisfaire ces « clients » en leur offrant notamment un régime plus clair, plus prévisible et plus efficace. Le RNCREQ n’a rien contre ces objectifs, mais il est d’avis que ceux-ci doivent passer après le tout premier objectif de la Loi, protéger l’environnement.
Dans le même esprit, le RNCREQ constatait que le Livre vert dresse un portrait assez détaillé des problèmes d’efficience de la loi en ce qui concerne les demandeurs, notamment quant aux délais de traitement, du nombre d’autorisation à délivrer, à la lourdeur des procédures, etc. Toutefois, un tel diagnostic n’existe pas quant à la capacité de la Loi de protéger efficacement l’environ-nement, ce qui est pour le moins surprenant.
Rappelons que depuis plus de vingt ans maintenant, le Québec ne dresse plus de portrait de l’état de l’environnement, un outil pourtant indispensable pour mesurer la capacité de l’État d’exercer son rôle de gardien du patrimoine naturel des Québécoises et des Québécois.
En ce qui concerne la prépondérance de la mission de protection de l’environnement sur le souci de satisfaire la « clientèle », le PL102 n’apporte guère de réponse satisfaisante, tel qu’en témoigne le passage suivant du mémoire du Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE).
Recommandation 2
À l’instar du CQDE, le RNCREQ recommande au gouvernement de modifier les dispositions préliminaires, à l’article 1 du PL102 en ajoutant dans le premier paragraphe les enjeux liés « à la protection de la santé humaine » et en ajoutant les deux paragraphes suivants :
« Elles visent à affirmer le caractère collectif et d’intérêt public de l’environnement ainsi que le rôle de l’État, son gardien, de le protéger et de l’améliorer, de participer
pleinement à la lutte contre les changements climatiques, à la préservation de la
biodiversité en respectant la capacité de support des écosystèmes et d’assurer une
gestion équitable de l’environnement et de ses ressources afin de répondre aux besoins des générations futures.
Les objectifs fondamentaux de cette loi font que la protection, l’amélioration, la
restauration, la mise en valeur et la gestion de l’environnement sont d’intérêt général
et concourent aux objectif d’un développement durable. »
Recommandation 3
Le RNCREQ recommande au gouvernement de procéder périodiquement à un diagnostic de la capacité de la LQE d’assurer « la santé et le bien-être de la population ». En outre, le gouvernement doit impérativement remettre en chantier l’exercice menant à un bilan annuel de l’état de l’environnement du Québec.
Comme nous l’avons dit précédemment, le RNCREQ partage les objectifs que poursuit le gouvernement du Québec avec la modernisation de la LQE afin d’en améliorer significativement la clarté, la prévisibilité et l’efficacité du régime d’autorisation.
En ce qui concerne spécifiquement la prévisibilité, notamment à l’égard des enjeux incontournables que sont la prise en compte de la capacité de support des écosystèmes, les effets cumulatifs, les particularités territoriales et l’acceptabilité sociale, le RNCREQ insistait dans son mémoire sur le livre vert sur l’importance de porter une attention particulière à la planification et l’analyse globale et intégrée le plus en amont possible. Cela favorise notamment la prise en compte de la gestion du
risque en fonction des particularités géophysiques, environnementales, économiques et sociales des territoires visés. En ce sens, nous insistions aussi sur la nécessité de mieux intégrer à la loi le rôle de l’évaluation environnementale stratégique (ÉES).
Bien que le RNCREQ accueille très positivement les avancés que propose le PL102 au chapitre des ÉES, nous croyons qu’il reste beaucoup à faire pour que cet outil puisse être utilisé à sa pleine valeur – ce que nous verrons plus loin. Sans modifications importantes, les bénéfices que cet outil moderne porte en termes de prévisibilité, d’efficience, de rigueur, d’acceptabilité sociale et d’opérationnalisation du développement durable, ne pourront jamais se concrétiser..
Recommandation 4
Le RNCREQ demande que l’évaluation globale (comme l’évaluation environnementale stratégique) soit revalorisée, ainsi que les processus de planification territoriale (schéma d’aménagement, plan de conservation, PMAD, plan d’urbanisme, Plan climat territoire, etc.) afin d’atteindre les objectifs que le gouvernement s’est fixés, non seulement avec la modernisation de la LQE, mais aussi en matière de mise en oeuvre du développement durable et de lutte contre les changements climatiques.
En ce qui concerne spécifiquement les évaluations environnementales stratégiques (ÉES), l’État doit non seulement mieux les encadrer, mais il doit aussi systématiser le recours à cet outil indispensable. Cela permettra d’assurer efficacement la prise en compte des seize principes de la Loi sur le développement durable, mais aussi de favoriser un régime d’autorisation plus efficace, plus cohérent et plus prévisible.
Les évaluations environnementales stratégiques devraient systématiquement s’appliquer aux stratégies et politiques qui ont une forte incidence sur le développement telles que la stratégie énergétique, la politique industrielle, la politique agricole, le Plan Nord, la stratégie maritime, les plans de transport, etc.
De la même manière, les choix d’investissement du gouvernement du Québec, que ce soit directement ou par l’entremise de ses sociétés d’État, incluant en particulier Investissement Québec, devraient passer l’examen d’une grille de développement durable et d’une évaluation des impacts climatiques.
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