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Mémoire : Consultation sur la gouvernance responsable des ressources énergétiques

Le 9 septembre 2024 – Le RNCREQ a déposé un mémoire à la Commission de l’agriculture, des pêcheries, de l’énergie et des ressources naturelles quant à la consultation sur le Projet de loi no 69 – Loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques et modifiant diverses dispositions législatives. Au travers de 25 recommandations, pour que le Québec puisse atteindre une transition énergétique durable dans le meilleur intérêt de la population québécoise et dans le respect de la capacité de support des écosystèmes, il faudra une grande conversation nationale qui mette en avant le respect des principes de sobriété et d’efficacité énergétiques.

Contexte

Le projet de loi 69 (ci-après “PL”) modifie profondément l’encadrement et la régulation de l’énergie au Québec. Il vise entre autres à accélérer le développement de l’énergie éolienne et à mettre en place une tarification dynamique pour les entreprises.

Le RNCREQ salue certaines mesures telles que le plan de gestion intégrée des ressources énergétiques (PGIRE), l’instauration d’un signal de prix visant à encourager la sobriété et les comportements vertueux qui soulagent la pointe, et l’inscription dans la Loi de mesures pour protéger les ménages vulnérables.

Ce projet de loi vient modifier le fonctionnement d’Hydro-Québec (HQ) et de la Régie de l’énergie.

Le RNCREQ constate cependant un manque d’arrimage de ce PL avec les enjeux socio-environnementaux auxquels fait face la société québécoise. 

De plus, il y a eu  très peu de pédagogie autour de ce projet de loi, qui touche pourtant l’avenir de la société québécoise toute entière. Une conversation nationale est nécessaire pour décider ensemble de ce que nous souhaitons faire de notre énergie.

Le RNCREQ émet dans ce mémoire des recommandations visant l’élaboration d’un plan solide pour l’efficacité énergétique ainsi que la mise en place d’une mobilisation coordonnée des paliers du gouvernement et du grand public en vue d’une transition énergétique durable et bénéfique pour tous-tes les Québécois-es.

Le RNCREQ émet également dans ce mémoire des  recommandations visant à renforcer le rôle de la Régie de l’énergie. Organisation indépendante créée à la suite d’ une vaste consultation en 1996, la Régie a vu ses rôles et responsabilités changer au fil du temps. Pour le RNCREQ, c’est l’occasion de renforcer son rôle et de l’outiller pour qu’elle puisse être garante de l’atteinte des objectifs liés à la transition énergétique. En annexe de ce mémoire, nous présentons l’analyse du Centre Hélios, avec laquelle le RNCREQ collabore depuis 1998 dans le cadre de ses interventions à la Régie de l’énergie.

Plan du mémoire sur la gouvernance responsable des ressources énergétiques

  1. Sobriété, efficacité et optimisation des ressources énergétiques
  2. Le PGIRE 
    – Arrimage du PGIRE aux politiques environnementales 
    – Indicateurs du PGIRE 
    – Élaboration et portée du PGIRE 
    – Portraits énergétiques régionaux
  3. Régie de l’énergie
  4. Une conversation nationale sur la transition énergétique 

Récapitulatif des 25 recommandations

Recommandation 1
Prioriser la sobriété et l’efficacité des ressources énergétiques ainsi que la circularité dans le PGIRE, et de rendre leur atteinte mesurable via des cibles et des indicateurs.

Recommandation 2
Faire la pédagogie de la sobriété et de l’efficacité énergétique auprès du public.

Recommandation 3
Appliquer les recommandations de notre mémoire sur l’encadrement et le développement des énergies propres au Québec (2023) :

  • Produire , etc. ;
    – Plusieurs mix de production : différentes sources (éolien, solaire photovoltaïque et thermique, géothermie, biomasse, hydrogène, gaz naturel renouvelable, etc.) plus ou moins développées en fonction des coûts et des disponibilités ;
    – Plusieurs options de flexibilité : gestion de la demande, interconnexions avec réseaux voisins, stockage par barrage et batterie, accumulateur thermique, biénergie, etc. ;
    – Des indicateurs environnementaux variés : émissions de GES, utilisation de ressources, utilisation des sols, respect des corridors écologiques, de la biodiversité, etc. ; et
    – Des facteurs politiques, économiques et sociaux : investissements nécessaires, coûts de production et de consommation, emplois et formations, sécurité et indépendance énergétique et des ressources d’approvisionnement, etc.

Recommandation 4
Modifier l’article 14.3 du PL 69 pour y intégrer une vision plus large des plans et stratégies influençant le PGIRE, en particulier des enjeux de protection de la biodiversité traités par le Plan nature.

Recommandation 5
Modifier l’article 14.3 du PL 69 pour que l’assujettissement du PGIRE aux objectifs du PEV et à son Plan de mise en œuvre apparaisse clairement.

Recommandation 6
Que les indicateurs du PGIRE incluent les éléments suivants:
– La capacité de charge des écosystèmes et la protection de la biodiversité
– La sobriété et l’efficacité énergétiques
– L’empreinte environnementale/carbone du développement de la filière énergétique, dont les réseaux de distribution
– La priorisation des actions dans les projets d’efficacité énergétique dans le respect des 3 RV et de l’approche RTA
– L’optimisation et l’amélioration des infrastructures existantes
– La disponibilité des ressources
– L’usage des terres et la protection des territoires dont le patrimoine de panorama
– La circularité de l’économie
– La santé publique
– La transition juste
– La collaboration des communautés d’accueil et l’acceptabilité sociale des projets énergétiques.

Recommandation 7
Modifier l’article 14.3 du PL 69 pour le rendre plus précis et spécifier que des consultations publiques auront lieu notamment auprès des municipalités, des premières nations et des parties prenantes concernées.

Recommandation 8
Modifier l’article 14.2 du PL 69 pour s’assurer que le PGIRE couvre toutes les formes d’énergie, dont les carburants.

Recommandation 9
Appliquer les recommandations de notre mémoire sur l’Avenir de la forêt (2024) :
– Développer la filière de la biomasse forestière résiduelle avec un encadrement permettant d’assurer sa durabilité.
– Mettre en place une tarification biénergie qui accorde un tarif préférentiel pour l’électricité si en contrepartie il y a utilisation de la biomasse lors des heures de pointe.
– Bonifier et pérenniser les programmes de subvention et d’aide au développement du chauffage à la biomasse.
– Créer des vitrines locales d’expertise pour les écosystèmes énergétiques régionaux afin de faire la promotion du savoir-faire existant.
– Former et sensibiliser aux avantages du chauffage à la biomasse forestière résiduelle les architectes, constructeurs, urbanistes, et autres professions de la construction.

Recommandation 10
Tenir une concertation avec le milieu de la construction pour s’assurer qu’il possède les connaissances et les moyens d’appliquer les bonnes mesures d’efficacité énergétique des bâtiments et de verdissement.

Recommandation 11
Que le PGIRE intègre des cibles en efficacité énergétique des bâtiments.

Recommandation 12
Appliquer les recommandations de notre mémoire sur la performance énergétique des bâtiments (2024) :
– S’appuyer sur les recommandations du Rapport sur l’état mondial des bâtiments et de la construction en 2022 de l’Alliance mondiale pour les bâtiments et la construction pour produire la réglementation nécessaire à l’application de la Loi sur l’efficacité énergétique des bâtiments.
– Que les bâtiments agricoles (particulièrement les serres) et les infrastructures des secteurs minier, pétrolier et gazier soient par règlement soumis aux mêmes obligations de performance que les autres types de construction.
– Que toutes les nouvelles constructions soient, de par leur conception, suffisamment efficaces pour avoir un impact minime sur la pointe.
– Que l’installation du gaz soit exclue dans les nouveaux bâtiments résidentiels.
– Créer un comité de suivi de la performance environnementale des bâtiments impliquant toutes les parties prenantes afin de s’assurer que les objectifs du PEV soient atteints.
– Rendre les données concernant l’efficacité énergétique des bâtiments accessibles au milieu de la recherche.

Recommandation 13
Favoriser le développement de politiques énergétiques régionales en :
– Accompagnant les collectivités territoriales dans leur transition énergétique par une série de mesures telles que la modification de la Loi sur les compétences municipales, des moyens financiers ou techniques pour permettre la réalisation des évaluations et/ou de projets d’efficacité énergétique.
– Intégrant les enjeux énergétiques dans la planification régionale via des Plans énergétiques régionaux.
– Instaurant un cadre réglementaire qui promeut l’autonomie énergétique régionale.
– Intégrant la valorisation des rejets de chaleur ainsi que les principes d’économie circulaire dans les politiques énergétiques.

Recommandation 14

Que le PGIRE exige la production de plans énergétiques régionaux, en collaboration avec les territoires.

Recommandation 15
Intégrer systématiquement les enjeux énergétiques dans les processus de planification régionale tels que les OGAT ou les programmes comme ATCL.

Recommandation 16
Modifier l’art.5 de la Loi sur la Régie de l’énergie afin d’inclure dans les principes guidant son fonctionnement sa participation aux objectifs de carboneutralité et d’efficacité énergétique du PEV ainsi que les cibles des politiques de protection de la biodiversité et des critères socio-environnementaux.

Recommandation 17
Modifier l’art.13 du PL 69 qui vient modifier l’art.5 de la Loi sur la Régie comme suit : “la Régie doit favoriser la satisfaction des besoins énergétiques, une transition énergétique ordonnée et au meilleur coût décarboné (…)”.

Recommandation 18
Modifier le PL 69 pour imposer une obligation de résultat aux distributeurs d’énergie concernant leurs programmes et mesures d’efficacité énergétique.

Recommandation 19
Modifier l’art.84.41 de la Loi sur la Régie pour lui rendre les pouvoirs d’analyse des mesures d’efficacité énergétique de tous les fournisseurs dont elle disposait avant l’adoption de la Loi 44 et ainsi s’assurer qu’elle puisse analyser les mesures du distributeur d’électricité.

Recommandation 20
Que la méthodologie d’évaluation des besoins en capacité de production supplémentaire soit établie par la Régie, et qu’elle propose au ministère divers scénarios de besoins anticipés incluant les éléments mentionnés dans nos recommandations sur le PGIRE.

Recommandation 21
Que la Régie mène les travaux d’analyse sur la consommation et la capacité de production.

Recommandation 22
Maintenir voire augmenter le nombre de commissaires à la Régie pour que celle-ci puisse être en mesure de rencontrer ses nouvelles obligations.

Recommandation 23
Préciser le cadre de la consultation autour du PGIRE afin de s’assurer que son format respecte les enjeux d’acceptabilité sociale.

Recommandation 24
Préciser le véhicule de la consultation, comme par exemple une évaluation environnementale stratégique.

Recommandation 25
Appuyer la consultation sur les divers scénarios et profils de consommations envisagés pour le PGIRE.

Conclusion

Le RNCREQ salue les avancées proposées par le projet de loi 69, notamment l’instauration du PGIRE, qui représente une initiative nécessaire pour le développement d’une planification énergétique durable au Québec. Toutefois, des préoccupations subsistent quant à la transparence et à l’inclusion des parties prenantes dans l’élaboration de ce plan. Le RNCREQ insiste sur l’importance de consultations publiques élargies et sur la nécessité d’arrimer le PGIRE aux objectifs environnementaux, sociaux et économiques du Québec, y compris ceux relatifs à la biodiversité, à l’économie circulaire et à la décarbonation des secteurs énergétiques.

Le RNCREQ recommande également des ajustements législatifs pour assurer une gestion plus cohérente et intégrée des différentes stratégies et politiques provinciales. Cela inclut une clarification du lien entre le PGIRE et le PEV, ainsi qu’une inclusion des autres planifications gouvernementales. Il est impératif que ce plan prenne en compte l’ensemble des sources d’énergie, tout en assurant que les principes de durabilité, de justice sociale et d’efficacité énergétique soient au cœur des décisions prises.

Enfin, pour que le PGIRE devienne un véritable levier de transition énergétique, il est crucial d’accompagner les collectivités locales dans l’élaboration de plans énergétiques régionaux, adaptés aux réalités et aux potentiels de chaque territoire. Ces démarches permettront de concilier développement économique et lutte contre les changements climatiques, tout en assurant une gestion responsable des ressources énergétiques et naturelles du Québec.

Le Québec est face à un tournant d’une importance historique, la décarbonation de notre société est une nécessité et une opportunité pour rendre notre production énergétique durable et la mettre au service de notre société.

Le RNCREQ et le réseau des CRE tout entier suivra avec attention les évolutions de ce projet de loi et continuera à offrir son soutien afin de favoriser cette transition.

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