Le Regroupement national des conseils régionaux de l’environnement du Québec accueille très favorablement les conclusions des commissaires du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) dévoilées hier par le ministère de l’Environnement et de Lutte contre les changements climatiques (MELCC) sur le projet d’usine de liquéfaction de gaz naturel d’Énergie Saguenay. Les conclusions vont dans le même sens que le mémoire déposé par le RNCREQ au BAPE en octobre 2020, à savoir un avis défavorable car «la somme des risques afférents au projet dépasse celle de ses avantages».
Une conclusion sans équivoque :
aucune des trois exigences imposées par le gouvernement ne sont respectées
Le ministre de l’environnement Benoît Charette a confirmé hier en conférence de presse que le projet ne remplit aucune des trois conditions exigées par le gouvernement : l’acceptabilité sociale, l’inscription dans une transition énergétique et une réduction globale des émissions de GES.
– Acceptabilité sociale
Le projet a suscité une participation publique sans précédent, puisque près de 3 000 mémoires ont été déposés – le RNCREQ souligne à ce titre la qualité de travail de synthèse des commissaires. Les principales préoccupations soulevées, notées par le BAPE, sont les émissions de GES ainsi que les impacts sur la biodiversité, la santé humaine et le mode de vie de trois Premières Nations innues.
– Réduction des émissions de GES
Le rapport du BAPE établit que l’impact du projet sur les émissions de GES mondiales serait au mieux neutre, au pire négatif. De plus, cette exploitation redoublée de gisements hydrocarbures va à l’encontre de l’objectif central de l’accord de Paris C’est l’une des principales réserves exprimées par le RNCREQ dans son mémoire, à l’instar de nombreux autres présentés au BAPE. Le RNCREQ considérait notamment que l’ensemble des émissions de GES du projet doivent être prises en considération, soit de l’extraction du gaz fossile dans l’Ouest canadien jusqu’à sa combustion sur les marchés internationaux.
– Transition énergétique
Le BAPE rappelle que, selon le Plan directeur en transition, innovation et efficacité énergétiques du Québec 2018-2023, le gaz naturel liquéfié (GNL) ne peut être considéré comme une énergie de transition s’il existe un accès aux énergies renouvelables, ce qui est le cas au Québec avec l’hydroélectricité. De plus, il souligne que le GNL pourrait retarder la transition des pays acheteurs en les encourageant à prolonger leur usage des énergies fossiles.
Autres inquiétudes du BAPE en ligne avec celles du RNCREQ
D’autres éléments alarmants mentionnés par le RNCREQ dans son mémoire ont été repris dans le rapport du BAPE, notamment :
– Un impact négatif sur la biodiversité marine
L’activité anthropique liée à ce projet, surtout l’augmentation du trafic maritime, aura pour conséquence un déclin accéléré de la population du béluga du Saint-Laurent, dont le rétablissement est un enjeu à la fois écologique, économique et social qui demande une stratégie de gestion durable et intégrée. À l’opposé de la tendance affichée par le projet, la réduction du bruit sous-marin est nécessaire pour la préservation de ce mammifère marin.
– Des débouchés incertains pour le produit
Le BAPE cite l’Agence internationale de l’énergie (AIE) qui observe un désengagement des gouvernements face aux énergies fossiles. De plus, les terminaux de liquéfaction existants ou actuellement en construction suffiraient pour combler la demande jusqu’en 2030 et risqueraient d’être en surnombre au-delà de 2040.
Le RNCREQ s’attend donc à ce que le gouvernement du Québec considère dans sa décision les conclusions de ce rapport qui reflète les préoccupations de la collectivité à l’égard de ce projet industriel.
« Non seulement ce projet va a contrario des objectifs du gouvernement en matière de lutte contre les changements climatiques, mais aussi, à la lumière des recommandations formulées par la commission du BAPE, il est clair qu’il n’est pas compatible avec le développement durable du Saguenay ni celui du Québec. Il devrait être fermement refusé par le gouvernement. », conclut Martin Vaillancourt, directeur général du RNCREQ
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Les principales préoccupations exprimées dans le mémoire du RNCREQ :
- L’approvisionnement en gaz naturel est essentiellement issu de gisements non conventionnels impliquant l’utilisation de la fracturation pour son extraction ;
- Le projet est incompatible avec les objectifs gouvernementaux de réduction des GES, tant québécois que canadiens ;
- L’absence de contrats fermes démontrant que le gaz naturel liquéfié sera uniquement vendu à des fins de substitution d’énergie plus polluante ;
- La portion de GNL qui sera vendu sur le marché “spot” invalide le scénario de substitution proposé par le promoteur, faute de connaître l’acheteur avant la vente ;
- Les émissions fugitives du projet entier annuleraient les efforts d’un scénario de substitution ;
- Seules les émissions de GES directes du complexe de liquéfaction seront évaluées ;
- L’étude d’analyse de cycle de vie réalisée par le CIRAIG ne peut conclure que le GNL contribuera à la transition énergétique ;
- D’ici 2030 le triple des navires circuleraient dans la voie maritime du Saguenay, ce qui engendrerait de nombreux impacts négatifs sur les mammifères marins et leur écosystème.